Les rayons d'une aube nouvelle filtraient au travers de mon antre. Le sol était moucheté de cette lumière, alors que le reste de ma tanière ne se faisant pas toucher par le soleil était plongé dans l'ombre. C'était le chant des oiseaux qui m'éveilla. La fatigue engourdissait toujours mes membres, alors que mes yeux s'ouvrirent dans la pénombre. Dans un soupir las et des mouvements lents, je me relevai sur ma litière de mousse. La brise soufflait au dessus du camp, laissant la chaleur pénétrer chaque tanière. Debout sur mes quatre membres fins, je m'étirai tout en baillant à m'en décrocher la mâchoire. Mes pattes avants s'étendaient devant moi, alors que mon arrière-train basculait vers l'arrière.

Je fis quelques pas, pour observer l'activité du camp. Les félins se levaient doucement, et commençaient à sortir avec leurs apprentis, ou pour une patrouille de chasse. Je me détournai de leurs mines joyeuses, pour rester dans ma solitude, au milieu de mes remèdes. J'entendis derrière moi un bruit, et mes moustaches frétillèrent. Sûrement un apprenti de corvée pour les anciens. Pour ne pas trop discuter, j'allai chercher de la mousse, imbibée de bile de souris. Une fois la préparation enfourchée dans un bâton, j'allais me retourner quand un souffle me caressa l'oreille :

« Bonjour, Berceuse du Corbeau ... »

Un frisson parcourut mon corps, alors que dans cet élan de surprise, je disparus de la vue du félin, devenant invisible. Lorsque je me retournai, je bousculai sans faire exprès le mâle, auquel je lui avais avec inattention fourré dans son museau la bile de souris. J'annulai mon pouvoir, alors que je reconnus qui était-ce. Je ne savais quel sentiment remontait de mes souvenirs. De la haine ? De la satisfaction pour mon coup non voulu ? Je ne savais pas. Je desserrai mes mâchoires sur le bâton, pour qu'ils puisse tomber. Le bruit sec qui fit écho dans le silence de mon antre ne me dérangea pas, alors que d'une voix mielleuse je prononçai :

« Mais qui voilà ? Notre, ô, très cher lieutenant. N'aurez-vous donc pas autre chose à faire qu'embêter vos camarades lorsqu'ils travaillent ? Comme faire les patrouilles, chasser ou aller voir les progrès de quelques novices. Je fis une légère pause, avant de poursuivre d'un ton plus sec. Ce n'est pas beau d'effrayer les félins du clan, sans cela, je ne t'aurais pas bousculé avec la bile de souris. »

Mon regard perçant se détacha de la paroi de ma tanière, pour se poser sur Noir Désir. L'amusement éclaira mes prunelles vives, et un sourire satisfait se dessina sur mes lèvres. Mes pattes étaient poisseuses du liquide médical, et je ne demandai qu'à aller me les nettoyer quelque part. Au lieu de me coller ce bon à rien, qui n'a que ça à faire que relancer cette histoire ancienne. En allant récupérer la branche avec la mousse et la ranger quelque part, je demandai :

« Ah, j'oubliais. Que voulais-tu en venant ici ? Tu es malade ? Blessé ? »