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Sujet: « Hissons nos couleurs » ▲ priorité à Monarque. Lun 27 Oct - 17:02
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NUITS FAUVES & MONARQUE
Ils étaient deux. La dualité est un concept qui avait toujours surprit et surtout intéressé Nuits Fauves. Il n’y avait qu’à le regarder pour en saisir un parfait exemple. Son poil était à la fois noir et blanc, l’obscurité et la pureté. Il était calme et vivait par la rage, surprenant mixage de deux émotions contraires qui, chez lui, étaient pourtant la base d’un équilibre qui lui convenait tout à fait. Quelque fois, il se disait qu’il aurait aimé avoir les yeux vairons, pour pousser encore un peu plus loin cette ambivalence, cette constante différence entre deux éléments. Tout ce qui paraissait instable passionnait le matou. Il aimait regarder les orages, attendre avec délectation le moment où la foudre allait enfin déchirer les nuages, où la tension serait trop forte pour qu’ils résistent à l’énergie lumineuse dévastatrice qu’ils portaient. Il aimait la boue, ce mélange sale et tantôt liquide, tantôt solide, qui faisait un de deux des forces de la nature, l’eau et la terre. Il aimait, enfin, observer l’être, voir comment les clans, prônant la suprématie d’une vie en communauté sur toute autre mode d’existence, s’entredéchiraient pourtant, annihilant ainsi l’idée même de communauté. Loin d’être humaniste, plutôt misanthrope que philanthrope, il avait toutefois de véritables instincts d’ethnologue, de sociologue, et passait le plus clair de son temps à observer la société féline qui palpitait de vie juste là, tout près de lui. Il trouvait ça passionnant d’assister en spectateur à leurs déchirements et à leurs amours, de les voir s’effilocher puis se reconstruire, mais il arrivait à la conclusion que, tout compte fait, la compagnie n’était qu’un leurre. Par pitié, pensait-il, arrêtez de faire de l’amour le sacro-saint motif de votre vie. Arrêtez de croire que vos respirations ne sont faites que pour et par l’être aimé. Arrêtez de vous leurrer et de penser qu’on ne peut vivre si on ne trouve pas d’âme sœur, d’élu à notre cœur. Sa conclusion était donc que la façon la plus saine de vivre était bel et bien de vivre seul.
On en revenait à la dualité. Le solitaire vivant à deux. Une aberration par rapport à l’étiquette qu’on lui assignait dans le dos : tu n’es pas d’un clan, tu es donc solitaire, tu ne vis pourtant pas seul, c’est donc une aberration. Car le fait été qu’il avait l’habitude de partager le quotidien d’un matou, Monarque, quand bien même il prenait plaisir à partir parfois pendant plusieurs jours en solo sans le prévenir. Il revenait toujours. Non pas par attachement, par affection ou par peur de la solitude, ni par avidité ou par arrivisme, toutefois : Nuits Fauves rejoignait Monarque car il était un objet d’étude aux ressources infinies. Il pouvait chaque jour le surprendre, et devenait de fait un cobaye particulièrement intéressant. Les escapades en solitaire du grand matou bicolore correspondaient aux moments où le caractère difficile de son rat de laboratoire devenait trop insupportable, même pour sa patience et son cynisme, mais même durant celles-ci, il repensait souvent à sa chose noire. Il y avait là de quoi réjouir n’importe qui en quête d’une source de réflexion infinie. Monarque était un connard. Pour cette simple raison, Fauve en faisant un sujet de choix. Il était délicieux de le voir détruire d’une phrase ce que certains avaient mis des mois voire des années à construire, de l’observer s’égosiller, drapé dans l’idée qu’il était Noir Désir, de le regarder s’embourber dans sa prétendue volonté de s’amuser, toujours s’amuser, en pseudo épicurien. Il adorait observer Monarque et son incohérente logique, et surtout, Monarque et son rapport aux autres. Il semblait que tout ce qu’il touchait se consumait immédiatement, comme si une malédiction malsaine eu poursuivie le félin, et Fauve se satisfaisait d’être devenu suffisamment glacé pour que Monarque ne parvienne pas même à le réchauffer.
Ils étaient deux. Ils marchaient ensemble sur la lande, en direction des quatre chênes. Quelque fois ils étaient plus, rejoints par des solitaires en quête d’un simulacre de foyer pour un soir, d’un peu de nourriture, ou tout simplement attiré par l’apparente sympathie de Monarque. Quelque fois, ils étaient moins, Fauve étant parti. Ils avaient l’habitude de la difficulté, du désespoir, des cris, des larmes, des glaces, du froid, de la douleur, de tout ce qui fait la vie de celui qui est seul. Pour résister face à ça, ils se collaient les uns aux autres, et le grand efflanqué prenait un grand soin à ne pas se retrouver dans la chaleur collective, se roulant en boule à quelques longueurs de queue des autres, juste assez près pour pouvoir écouter les conversations sans bouger, ses yeux jaunes dardés sur les autres, juste assez loin pour que le froid chéri s’abatte sur lui comme une couverture. Ils avaient toujours vécus seuls et même ensemble, ils restaient chacun seuls. Ils n’étaient là que pour échanger un peu de viande et de confort. Ils se regroupaient tous sous le même pavillon noirci de solitude, d’errance et de survie.
Ils étaient arrivés aux quatre chênes. Promenant son regard mordoré sur les alentours, dans la lumière du levant, Fauve sentit que quelque chose était en train d’arriver. Il sentit que le vent qui soufflait murmurait un message. Il sentit que Monarque à côté de lui sentait aussi. La forêt s’étendait devant eux, et Fauve eu l’impression qu’une nouvelle ère s’ouvrait.
Monarque et lui s’étaient réunis sous le même pavillon noirci de solitude, d’errance et de survie.
« Tu le sens aussi, n’est-ce pas ? »
Ils en avaient désormais hissé les couleurs.
Monarque
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Sujet: Re: « Hissons nos couleurs » ▲ priorité à Monarque. Lun 27 Oct - 19:53
Ils étaient deux. Tout le monde était parti au petit matin, les vétérans, chatons, diseurs de bonnes aventures. Monarque s’étirait, avait couru à la suite des pas de Nuits Fauves, avec cet espèce d’air niais qui le caractérisait. Il avait eu ce mot à la bouche durant les heures qui avaient composés leur ballade. Nuits Fauves, c’est quand qu’on arrive ? Dieu bénisse le géant d’avoir une patience à l’effigie de sa grandeur, certains auraient atomisés Monarque d’un coup de patte. Ses yeux vairons étaient encore plus cernés que d’habitude, et le petit félin noir se dandinait en marchant, la démarche comme possédée par le rythme d’une musique que seul lui entendait. Sa réflexion commença à ce moment précis. Si, vous savez, ce moment où ses drôles d’yeux se posèrent sur l’étrange cas de monsieur Fauves.
« Pourquoi je traîne avec toi en fait ? »
La question commençait doucement à murir dans sa tête. Pourquoi Nuits Fauves et pas quelqu’un d’autre ? Il fouillait dans les bribes de souvenirs de sa tête et d’un coup, le monde entier devenait bleu. Monarque voyait le monde en couleur, les chats en couleur. Nuits Fauves était du bleu nuit, et il était du vert. Il s’amusait avec les volutes bleutées qui s’émanaient du corps de Nuits Fauves, les faisant danser au bout de ses pattes. Il devait traîner avec Nuits Fauves pour cette raison peut – être, il était bleu nuit, et non fuchsia ou kaki. Les pattes endolories, il demanda une nouvelle fois où ils allaient, et le grand félin demeurait muet. Monarque soupira. Son mutisme l’agaçait, et ses réflexions reprenaient. Nuits Fauves était de ces félins taciturnes qui fascinaient et agaçaient. Il refusait la compagnie, mais restait avec le dernier des fainéants. Pourquoi. Brave question. La destination devait être encore un fantasme de monsieur Nuits Fauves, désirant montrer les recoins perdus de Cerfblanc à son acco… Oh, il ne ferrait pas ça. Le taciturne se foutait d’Hon, et Hon se foutait de lui. A vrai dire, il ne savait pas comment juger leur relation, si elle était malsaine ou au contraire complètement normale.
Ils étaient l’introverti et l’extraverti. Monarque parlait fort, riait fort, marchait en faisant beaucoup de bruit, mangeait bruyamment, vivait bruyamment. Nuits Fauves était une ombre habile, glissant au dessus de la forêt, gérant le stress d’autrui. Monarque s’oubliait pour oublier, Nuits Fauves aussi. C’était certainement ce qui les liait. Ils étaient compagnons de galère, à travers le froid nocturne, l’hiver cruel et la perdition féline. Ils semblaient être des félins raisonnés au milieu d’un monde de soldats. Ils étaient des hippies félins, mais le vivait naturellement bien. A travers les tempêtes, ils se serraient les coudes, chassaient ensemble, et après tout, c’était l’essentiel. C’était pour ça qu’ils trainaient ensemble. Malgré leurs différences et leur dualité si évidente, ils avaient énormément de points communs. Le premier point commun, et le plus évident, était le fait qu’ils aient tous deux été rejetés, amicalement, socialement, amoureusement aussi.
Monarque serra les dents un moment. Amoureusement. Il effaçait le visage de cette femelle qui détruisait sa vie. L’ingrate avait eu le malheur de surgir dans son esprit, et Monarque jugeait son cas pendable la prochaine fois qu’il la voyait. Nuits Fauves parlait peu de son passé, voire pas du tout. Monarque ne savait rien de lui. La signification de son nom, il n’en savait rien. Nuits Fauves avait partagé sa vie un moment, savait qu’il avait eu cette autre demoiselle qu’il avait abandonné sans rancune. Le reste … Monarque s’inventait une autre réalité plus joyeuse et colorée. Pour oublier, qu’il disait.
Les Quatre Chênes se dressaient devant eux. Le chat noir sourit doucement. C’était joli, et il aurait menti s’il disait si ce paysage ne lui inspirait rien. Il adorait ces lueurs matinales qui s’étiraient au loin, cette rosée sur le feuillage. Postés en haut d’une colline, ils avaient l’air de créatures divines, prêtes à punir Cerfblanc de ses pêchés. Monarque rit nerveusement, refusant de s’extasier devant un tel spectacle.
« Tu le sens aussi, n’est-ce pas ? »
Le petit félin dressa ses oreilles sur son crâne d’un air étonné. Sentir. Le vent ? Cette puissance matinale ? Ce jour nouveau qui naissait ? Il haussa les épaules et prit son sourire de coin, couvrant le paysage du regard.
« Nuits Fauves. Mon chéri d'amour. Commence pas tes allusions de poète maudit. Sérieusement, tu viens de commencer c’est déjà chiant. Oui, je sens le vent, tout le monde le sent ? Tu sais pourquoi ? Le vent, c’est universel, c’est un élément que seul les personnes n’ayant pas de toucher ne peuvent pas sen… T’imagines t’as pas de toucher ? Le monde serait affreux. Pas de chaleur, pas de froid. Quelle horreur. Où j’en étais déjà ? Je me suis paumé Fauves, ça commence bien je pense. »
Il recula un peu, le museau vers le ciel, les pupilles dilatées à cause de la luminosité fourbe du matin. Il fit un tour sur lui-même, captivé par les changements de paysage que la rotation lui permettait. Il se mit à rire, accélérant les tours sur lui-même qu’il faisait. Il cessait, tentant son corps se balancer dans tous les sens. Il rit une nouvelle fois, aux anges. Il adorait les sensations étranges et dérangeantes. C’est pour ça que la douleur lui plaisait. Il adorait cette sensation grisante de plus rien ressentir après. Il oubliait la douleur par la suite, et c’est ce qui le rendait heureux. Il braqua son regard sur la colline et une idée lui traversa l’esprit.
« Fauves ! Fauves ! »
Il avait eu l’audace de penser pendant une fraction de seconde, que foncer tel un boulet de canon sur son ami allait l’enchanter. Les voici, dévalant la colline comme des mottes de foin. Monarque riait, les yeux grands ouverts sur les sensations de nausées que lui provoquait ce paysage qui tournait et se déformait sous l’effet du tournis, riant de plus en plus fort au fil et à mesure de sa chute. Il finit sa course contre le tronc d’un arbre, retenant un cri de douleur en sentant l’écorce se heurter à sa côte.
« C’était génial putain ! Allez on recommence ? Je te jure, c’est géant ! Tu le remarques peut – être pas tout de suite, mais t’as l’habitude de tirer ta tronche de blasé h24, à la force on commence à être aussi blasé que toi en te voyant ! »
Hésitant, ses pas étaient encore difficiles tant sa tête tournait. Il était un piètre compagnon de fortune, aimant à soucis, vampire à bonne situation. Il était une ordure, un connard comme certains se plaisaient à l’appeler. Au moins, il profitait de sa vie.
Nuits Fauves
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Sujet: Re: « Hissons nos couleurs » ▲ priorité à Monarque. Mar 28 Oct - 12:52
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NUITS FAUVES & MONARQUE
Le sarcasme était l’unique parole qu’ils partageaient. Nuits Fauves et Monarque n’avaient peut-être que ce point commun, un amour terrible et cynique pour la dérision, qu’ils considéraient comme le meilleur des moyens d’expression, et dont ils se fichaient mille fois des conséquences. L’un comme l’autre raillait continuellement tous ceux qu’ils croisaient, chacun à sa façon. Monarque jouait sur la quantité, Fauve sur la qualité. Monarque ne laissait pas un instant de répit à sa victime, il la tuait par l’épuisement, endurant dans son œuvre, tapant sans s’arrêter jusqu’à ce qu’il ait gagné. Fauve, lui, observait en silence, tranquille, puis d’une voix nonchalante, avec son habituel air étrange, lâchait une de ces phrases assassines qui vous mettait du plomb au fond du cerveau et vous passait l’envie de continuer la joute. Ce n’était pas forcément qu’il avait raison ; c’était juste qu’on comprenait qu’il était de ce qui ne perdent jamais leur calme, et qu’on avait beau frapper il allait faire abstraction de nos coups et conservait ce demi sourire bizarre si déstabilisant. Il le garda en écoutant Monarque déblatérait ce qu’il classa dans la catégorie « conneries inutiles et frivoles » réservée au félin noir, dans la véritable armorie à données qu’était son cerveau. Comme d’habitude, il n’avait rien compris. Peut-être que la vie n’était qu’une putain de le destiner à étudier cet être obtus et dépourvu d’une quelconque cohérence. Fauve sourit intérieurement, il était mal placé pour juger de la cohérence de son condisciple. Il le taxait de poète maudit, croyait naïvement – à moins que ce ne soit bêtement ? – qu’il lui parlait du vent qui soufflait. Fauve lui jeta un regard indescriptible. Il lui parlait de l’universalité du vent. C’était une drôle d’idée, mais le concept était, à vrai dire, plutôt réaliste. Est-ce qu’on pouvait bloquer le vent, tuer le vent, frapper le vent ? Est-ce qu’il existait des endroits où jamais il n’y aurait de vent ? De courants d’air ? Peut-être dans certaines grottes et cavernes, peut-être dans les maisons de béton que bâtissaient les hommes pour se cacher des intempéries mais plus encore et surtout du regard des autres qu’ils quêtaient comme des mendiants dès qu’ils avaient passé le pas de leur porte ouverte sur la rue à la moindre de leur sortie. Fauve aimait ce paradoxe. Cette dualité. C’était intéressant à observer.
Il fut tiré de ses pensées par un choc violent sur le côté, qui le projeta un mètre plus loin, une masse sombre agrippée sur lui, avant de se mettre à dévaler la colline. Monarque le lâcha, hurlant de rire, comme un fou, un maudit, un damné – n’importe qui qui aurait perdu la raison et déverserait un rire sardonique et à faire froid dans le dos sur la lande. Sans esquisser un sourire ou même s’amuser du jeu du gamin, Fauve sortir ses griffes pour chercher à ralentir sa descente, et parvint à s’arrêter in extremis avant de percuter un arbre. Se relevant sur ses hautes pattes blanches et noires, il eut un moment de déséquilibre, tandis qu’une profonde sensation de nausée s’emparait de lui, mais il parvint à rester debout, face au gamin qui trépidait déjà à l’idée de recommencer. Sans répondre aux reproches de Monarque, qui le taxait de blasé et insinuait que sa neutralité était contagieuse, le grand efflanqué se fit un rapide brin de toilette, enlevant de son poil ras les brins d’herbe que le noiraud était venu y coller. Une fois cela fait, et seulement une fois que ce fut fini, il darda ses prunelles jaunes sur son camarade d’infortune, gardant le silence un instant. Il savait qu’une fois le regard capté, il lui suffisait d’attendre quelques secondes, et l’attention venait, on comprenait qu’il allait parler, on attendait ce qu’il allait dire, on se demandait – il laissait volontiers ce petit instant de doute, voire de panique, à ses interlocuteurs, sachant pertinemment qu’ils portaient enfin réellement attention à ses propos. Il savait calculer l’instant exact qu’il fallait, pour que la répondre fuse assez vive, mais sans pour autant l’être trop, et tout en conservant cette tonalité lente, un peu sarcastique, un peu douce, indescriptible et indéfinissable qui le caractérisait.
« Dans ce cas, heureusement que c’est moi le contagieux ... »
Si le contact de Monarque vous faisait devenir son égal, Fauve se serait calfeutré pour continuer son étude sans risquer la maladie. Oui, c’était ce qui le décrivait le mieux. Monarque était une maladie, un parasite, un virus, quelque chose qui s’accroche à vous, déchire votre physique, vous plonge dans un état désagréable et qu’on cherche par tous les moyens à se débarrasser. Pour le moment, Fauve considérait qu’il était un porteur sain, et il en félicitait son système immunitaire mental, remerciant sa résistance de ne pas avoir fait de lui le semblable du noiraud. Il aurait détesté être couleur suie, surtout de la façon dont l’était Monarque. C’était comme si elle avait été jusqu’à encrasser son cerveau, son estime de lui, tout ce qui le caractérisait, et elle laissait son empreinte partout là où il touchait.
Monarque
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Sujet: Re: « Hissons nos couleurs » ▲ priorité à Monarque. Mer 29 Oct - 22:02
Nuits Fauves ne riait pas. Monarque esquissa un sourire et leva les yeux au ciel. Quel idiot il était, il avait oublié une des maximes les plus importantes de leur colocation, une règle essentielle, une réalité, un maître-mot. Mesdames, messieurs, c’était clair. Nuits Fauves ne riait jamais. Là où certains chats se seraient découragés dès les premières tentatives, Monarque ne cessait de tenter de faire sourire –ou même souffler du nez !- Nuits Fauves. Autant vous dire que ces piètres tentatives étaient vaines, mais le petit noiraud n’était pas du genre à abandonner. Il allait tenter, nuit et jour, face à un géant endormi ou éveillé, dans son assiette ou à jeun, il avait l’habitude de Fauves à vrai dire. Décidément, la dégringolade masochiste du petit solitaire ne l’avait pas amusé, du tout. Penaud, Monarque se contentait de savourer le plaisir qu’il éprouvait après la douleur, quand la blessure devient froide et que l’ivresse du mal envahit quelqu’un. Une pelouse entière collée à lui, il avait cet air de déglingué de l’intérieur qui s’était multiplié, sautillant, un sourire niais au visage.
« Dans ce cas, heureusement que c’est moi le contagieux ... »
Le noiraud tira une moue étrange, son museau se tordant vers la droite dans un angle impossible. Il se contenta de prendre cette remarque pour une pure blague, se disant que cette pique ne valait pas le coup d’être relevée. Nuits Fauves détestait – il le malheur ? Prenons cet exemple ci-contre. Il était contre le vacarme, le bazar, le désordre, le chaos que diffusait Monarque sur son chemin. Monarque était un mâle mouvementé, ayant trop de tristes pensées en réalité, désirant juste crier et se rouler par terre. Dans certaines cultures, on disait qu’hurler éloignait les démons, mais chez le solitaire, ses démons semblaient tristement sourds.
« Vous parleriez de vent. » Il esquissa un petit sourire et soupira. « Toute la journée. De vents gris, verts, bleus, jaunes, oranges. Surtout de vents gris j’ai l’impression. »
Il plissa une paupière, baissa légèrement une oreille, jeta un regard autour de lui. Personne. Les Quatre Chênes étaient déserts, et il se serait bien damné pour avoir un clanique qui venait. Il l’aurait emmerdé, un peu, puis lui aurait proposé sa sympathie. Surtout sa sympathie. C’était peut – être un sacré fêtard comme lui. Doux Jésus, oui, si c’était un sacré fêtard, il se serait damné devant les Sept Cercles Infernaux pour cet ami. En attendant. Il avait Nuits Fauves. C’était pas vraiment un ami, pas vraiment un ennemi, pas vraiment une plaie à supporter. C’était plus une sorte de grand frère, mais il savait pas pourquoi.
« Oh non. Vous ne parlerez pas du tout. » Il n’était pas cohérent dans ses prises de paroles. « Non. Pas du tout. Oh je sais ! Vous parlerez de vents, ou de vos philosophies trop dark, avec vos voix de mecs blasés. Un monde de Fauves, quelle horreur aha ! A la fin, vous serez tous tellement blasés après avoir analyser votre propre connerie –puisque vous composerez votre monde entier-, que vous organiserez des suicides collectifs tous ensemble, du haut de vos pattes qui font la taille de Cerfblanc, et vous vous louperez. Bien sûr. » Il eut un sourire mesquin. « Sinon c’est pas drôle. »
Bienvenue dans le merveilleux monde candide de Monarque, pour vous servir. Il ne comprenait pas forcément l’intensité de l’horreur qu’il venait de sortir, et les insinuations absolument affreuses qu’il venait de faire, mais il gardait son sourire mi-figue mi-raisin. Au fond, on savait pas réellement s’il comprenait ce qu’il sortait. Il jouait peut – être à l’imbécile. Tandis que certains s’efforçait à vouloir faire bouger les choses à force d’esprit, Monarque se contentait de s’assoir en haut du monde et d’analyser, prenant son masque d’imbécile fêtard. Il était un peu spécial, mine de rien. Un jour il s’appellera Petit Papillon, le lendemain Monarque, le surlendemain Noir Désir et un jour, il finira Dame Blanche, femelle dans l’âme mais biologiquement homme qui sait. Il aimait son théâtre et le monde qui y dansait, et il tenait trop à ses costumes pour les abandonner.
« Fais pas la gueule voyons. Sérieusement je t’ai jamais entendu rire Fauves, ça me rend super triste tu sais. »
Il tira un sourire exagéré dans la tristesse. Le pire dans cette phrase, c'est qu'il mentait à peine.
Nuits Fauves
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Sujet: Re: « Hissons nos couleurs » ▲ priorité à Monarque. Dim 9 Nov - 13:03
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NUITS FAUVES & MONARQUE
De l’intérieur, Nuits Fauves s’imaginait à la fois chamarré et terne. Il avait toujours pensé que ses pensées fusaient dans la couleur, et qu’il était un tableau à la manière fauviste, un Matisse ou un Delaunay peut-être, une de ces œuvres à la perspective absente, aux couleurs se mêlant entre elles et se renvoyant les unes aux autres, à la touche picturale épaisse et marquée. Il pensait que si on avait regardé dans son intérieur, on aurait vu les traces bariolées que laissaient ses idées tandis qu’elles parcouraient son esprit de tous sens, et que dans toute cette frénésie picturale, le bleu serait devenu une couleur chaude. La profusion de pensées en lui aurait pu, il le pensait sincèrement, réchauffer n’importe quel en stimulant l’intérêt, l’invitant à réfléchir, à se poser la question de comment s’était peinte sa toile intérieure. Il se demandait la signification des couleurs, pourquoi le bleu, pourquoi le rouge, pourquoi le vert, pourquoi le gris, pourquoi le chaud, pourquoi le froid quand on les regardait ? Il aurait aimé pouvoir redéfinir les concepts que la société nous imposait et faire du roux la couleur la plus froide du monde, à l’instar du cœur de la rouquine Vermeille. A son contact et à celui de son frère, Fauve avait appris à jeter du noir sur les toiles pour les gâcher, et que la vie en communauté entache et désagrège toute pureté initiale. Il s’attachait de fait particulièrement à ses principes de solitude, se méfiant de l’attachement comme du pire fléau, et préférer demeurer seul, malgré le froid, la pluie, la nuit, plutôt que de côtoyer les clans. Les clans étaient un obstacle au développement pur de la société. La vie en communauté était synonyme de luxure, d’exhibition, de mensonge, d’instabilité, et plus que tout, de trahison. Il n’arrivait pas un moment sans que les attentes de chacun ne se voient bafouées par le groupe ou un de ses membres. L’espoir était vain ; on risquait chaque jour de se faire poignarder par celui que l’on jugeait des siens. Seul, on ne courrait aucun risque, sinon de se décevoir soi-même, mais Fauve savait d’expérience que l’on apprend rapidement ses faiblesses et qu’on s’accorde souvent, à vrai dire, bien moins de confiance qu’à autrui. C’était une raison simple et, à ses yeux, parfaitement valable de pourquoi il jugeait inutile de se confier à qui que ce soit, à commencer par Monarque.
A son habitude, ce dernier le taxait de silencieux. Ca, Fauve devait bien l’admettre, mais il s’étonna du choix de Monarque. Parler de vent ? Pourquoi pas. Il y avait des milliers de formes de vent, celui glacé qu’on ressent dans le pelage, celui qui vous pousse vers l’avant, celui qui souffle dans les esprits, celui qui vous gèle de l’intérieur, celui qui fait tomber les remparts, celui qui murmure sur le vide, celui qu’on met aux gens, s’il prenait en compte dans sa liste non exhaustive des différentes alizées les excentricités de langage de notre époque. Le matou bicolore eu du mal à saisir la suite du discours du charbonné, ne retenant que quelques mots clés qu’étaient ‘philosophies trop dark’, ‘blasé’, ‘analysé votre propre connerie’ et ‘suicide collectif’. Il braqua son regard mordoré sur Monarque, un léger sourire se dessinant sur ses lèvres. L’idée du suicide collectif était assez plaisante, elle permettait une épuration volontaire et consciente. Le suicide était, aux yeux de Fauve, l’un des rares problèmes philosophiques sérieux, avec l’anarchie. On ne pouvait tous les deux les assurer acquis que lorsqu’ils étaient réalisés, que le cœur cessait de battre et que la hiérarchie se retrouvait au sol sans que personne ne vient contester, ne cherche à se nommer meneur, bref, que lorsque la finitude volontaire de la vie ou d’un gouvernement était arrivée. Le plus souvent, comme le soulignait si bien Monarque, on se ratait. Pour de multiples raisons, Fauve ne s’était lancé ni dans la tentative du suicide, ni dans celle de l’anarchie, et son explication première était que son observation de la corruption, du déni, du mépris, du gel interne, de la purulence, de ce tout, délétère et dégoûtant que formait la société clanique n’était pas encore finie, et il pensait que de fait le suicide comme l’anarchie pouvait attendre, bien qu’il approuve les deux choix, quand ils étaient fait à bon escient. Il jugeait que l’on ne pouvait se suicider que lorsqu’on avait réalisé l’absurdité de la vie, et non pas par malheur ou par désespoir, et que l’anarchie ne devait pas être un coup d’état, mais bien l’instauration d’un nouveau mode d’existence basé sur la non-règlementation du monde. En parlant de fin, il trouva particulièrement mal choisie celle du discours de Monarque. Il était triste que depuis le temps qu’ils se côtoyaient, le noiraud n’ai pas compris qu’il fallait convaincre Fauve et non pas le persuader, même si, après tout, l’un comme l’autre était à peu près aussi difficile. Il accordait juste moins de crédit à ceux qui cherchaient bêtement à faire vibrer ses sentiments, et quand bien même il n’en accordait pas beaucoup plus à ceux qui proposaient de réels arguments, il notait l’effort.
« Tant pis. »
Il avait répondu d’un ton tranquille, soulignant bien le peu d’intérêt qu’il portait à la prétendue tristesse de son camarade, et se replongea quelques instants dans le silence, avant de reprendre la parole, d’un ton assez bas, s’exprimant comme s’il ne faisait que constater les faits, alors qu’en réalité il les anticipait.
« Quelque chose va arriver, Monarque. Fais-moi confiance. On entre dans une nouvelle ère. »
Nuageuse Pégase
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Sujet: Re: « Hissons nos couleurs » ▲ priorité à Monarque. Dim 28 Déc - 20:53
Du nouveau ??
Vent Nocturne
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Sujet: Re: « Hissons nos couleurs » ▲ priorité à Monarque. Ven 30 Jan - 22:10
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Sujet: Re: « Hissons nos couleurs » ▲ priorité à Monarque.